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Urbanisme – Droit de préemption – Suspension du délai pour préempter : non bis in idem (TA Versailles, 18 février 2022, n°2104007)

Par 21 février 2022Actualité

Comme mentionné dans une précédente note, le juge des référés du Tribunal administratif de Versailles avait suivi notre raisonnement en matière de computation des délais de droit de préemption sur un sujet non traité en jurisprudence.

Il ne nous apparaissait en effet pas envisageable que le titulaire du droit de préemption puisse formuler dans un premier temps une demande d’informations dans le délai légal de deux mois, et à compter de la réponse du propriétaire à cette première demande, prétendre prolonger une nouvelle fois le délai d’exercice du droit de préemption à la suite d’une demande de visite du bien (en ce sens : TA Versailles, référés, 22 juin 2021, n°2104008) – conformément au régime de suspension des délais créé par la loi ALUR du 24 mars 2014.

La solution retenue par le juge des référés du tribunal administratif de Versailles était à notre sens commandée par le principe selon lequel le propriétaire vendeur doit pouvoir, de façon certaine et dans les plus brefs délais, savoir s’il peut poursuivre son aliénation malgré l’existence d’un régime de préemption.

Dans ses conclusions sur l’arrêt FINADEV (CE, 24 juillet 2009, n°316158), Anne Courrèges s’exprimait ainsi :

« Mais, en sens inverse, nous pensons que l’envoi d’une DIA complète et exacte devrait faire obstacle à ce que l’administration puisse faire naître un nouveau délai en en sollicitant une nouvelle, même si le délai de deux mois n’est pas encore expiré. En juger autrement reviendrait à donner au titulaire du droit de préemption la possibilité de rouvrir, à sa convenance, le délai de préemption. On imagine l’insécurité juridique qui en résulterait pour les vendeurs et acquéreurs. Une telle faculté irait à rebours de l’objet même du délai de deux mois. Car ce délai a été conçu comme une garantie pour les personnes désireuses d’aliéner un bien soumis au droit de préemption en ce qu’il leur permet de savoir de façon certaine, à son issue, si elles peuvent ou non poursuivre l’aliénation entreprise ».

Egalement jugé en ce sens : CE, 13 mai 1996, Commune de Franconville-la-Garenne, p.178, Concl. Maugüe (BJDU 1996 p.267) ; ou 15 mai 2002, Ville de Paris / Association cultuelle des témoins de Jéhova de Paris, p.173.

Le juge du fond du tribunal administratif de VERSAILLES, sur conclusions conformes, vient de confirmer cette analyse en indiquant dans son principal considérant que :

« Il résulte [des articles L.213-2 et R.213-7 du code de l’urbanisme] que le délai d’exercice du droit de préemption prévu à l’article L.213-2 du code de l’urbanisme ne peut être suspendu qu’une seule fois, à compter de la réception par le propriétaire du bien, soit d’une demande de communication de documents, soit d’une demande de visite du bien »

Il s’agit à notre connaissance de la première décision sur ce point de droit.

Pour rappel, dans cette instance, la DIA avait été reçue le 13 janvier 2021 et ce n’est que près de quatre mois après que le propriétaire avait été finalement destinataire de la décision de préemption litigieuse.

C’est donc sans surprise que le tribunal a considéré d’une part, que la décision attaquée était intervenue après l’expiration du délai d’exercice du droit de préemption et d’autre part, qu’elle avait été également transmise tardivement au Préfet au titre du contrôle de légalité, concluant en toute logique à son annulation.

CA/GL